20 février 2023
Conseils au petit jeune auteur
Vous êtes jeune et vous portez un livre. Vous vous demandez ce qui vous arrive.
Essayez de ne pas trop penser à vos lecteurs car eux ne pensent pas à vous. Quand ils vous lisent, ils pensent à eux et non à vous. C’est normal.
Ne pensez qu’à votre livre en cours, c’est pour cela que vous êtes sur Terre. Le reste vous enquiquine, l’engagement, la politique, le bénévolat, l’économie, le sport, toutes ces salades. Ne pensez qu’à votre livre. S’il n’a pas de lecteurs ou très peu, ce n’est pas grave. S’il n’a pas d’éditeur, c’est peut-être bon signe. De toute façon, il existe des machines qui peuvent le fabriquer en petites quantités, à la demande. Même s’il n’y a que dix demandes, c’est fabuleux.
Ne pensez pas au succès et à la reconnaissance sociale, ces sucreries qui sont des poisons lents pour vous et votre livre. Méfiez-vous des sorties entre potes, votre livre en souffre. Ne cherchez pas à être aimé ou compris pour votre livre, c’est déjà bien assez compliqué en amour et en amitié, laissez votre livre en dehors de tout cela.
Votre livre est sinueux, pas vous. Votre livre c’est comme le tram, ne le laissez pas partir sans vous. Rêvassez, flemmardez et glandez tant que vous voulez mais dès qu’il s’agit de votre livre, arrêtez. Ne soyez pas sociable c’est-à-dire distrait, partez direct en ligne droite jusqu’à la fin.
Allez droit au but, ne perdez pas de temps à écrire sur les autres (bien qu’une exception pour les amis, si vous en avez, soit possible), ils ne vous en sauront pas gré. Laissez les hommages aux nécrologues et autres stratèges. Ne soyez pas journaliste.
Votre but est un signe de ponctuation : le point final.
Après, il faudra tout relire, corriger, peut-être modifier, peut-être tout réécrire, peut-être tout jeter puis recommencer une autre traversée jusqu’à un autre point final et ainsi de suite en direction du dernier point final, celui que vous n’aurez pas le temps de poser.
Le point final, vous dis-je, rien que le point final.
16:22 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : carnet, note, journal, blog littéraire de christian cottet-emard, ponctuation, auteur, point final, conseil, christian cottet-emard, tramway, livre, littérature, jeune auteur, écriture
15 février 2023
Vient de paraître : Tu écris toujours ? (Version intégrale)
Tu écris toujours ?, mes chroniques humoristiques sur la condition d'auteur ont été publiées en feuilleton illustré par les dessinateurs David Miège et Dominique Goubelle à l'initiative de Joseph Vebret entre 2007 et 2012 dans le trimestriel Le Magazine des livres édité par le groupe Lafont presse.
Les éditions Le Pont du change créées et dirigées par Jean-Jacques Nuel ont publié une sélection de ces épisodes en un recueil de 93 pages paru en 2010.
Cet éditeur ayant cessé ses activités, c'est aujourd'hui le label Orage-Lagune-Express qui reprend la publication de l'intégralité de ces textes dont plus de la moitié était restée inédite en volume.
Cela donne une nouvelle édition au format de poche de 210 pages comportant l'intégralité du feuilleton.
- ASIN : B0BTRRBS4V
- Éditeur : Orage-Lagune-Express (diffusion Independently published).
- Langue : Français
- Broché : 210 pages
- ISBN-13 : 979-8376160671
- Poids de l'article : 236 g
- Dimensions : 11 x 1.35 x 18.01 cm
Déjà en vente par correspondance sur :
- Amazon
- Pour les lecteurs d'Oyonnax (Ain) et sa région : en point de vente (kiosque du centre hospitalier d'Oyonnax) à partir du 25 février.
Un extrait :
Conseils aux écrivains qui ont la migraine
La migraine n’est pas seulement une maladie d’écrivain, elle touche aussi les journalistes et probablement d’autres créatures. Parfois, j’ai l’impression qu’elle tourmente même Sir Alfred, le chat de mon voisin, lorsqu’il multiplie les aventures. Et les céphalopodes ? Souffrent-ils de la migraine ? On peut se poser la question et toute une série du même genre mais à quoi bon se casser la tête ?
À propos de tête, je me demandais, attablé à une terrasse de café en cette fin de matinée, à quoi pouvait bien ressembler celle de la journaliste avec qui j’avais rendez-vous pour lui parler d’une chose aussi importante pour l’humanité souffrante qu’un pet de souris mais à laquelle j’accorde tout de même un peu d’intérêt : la parution de mon dernier livre. Lors du contact téléphonique, j’avais proposé à la rédactrice de l’attendre en ce lieu si propice à l’échange culturel qu’est le bistrot en arborant un signe de reconnaissance, le Républicain Populaire Libéré du Centre ouvert à la page culturelle.
Cette idée pourtant originale faillit échouer. En effet, on était lundi et la page culturelle avait disparu au profit de la publication des résultats d’un tournoi interdépartemental de pétanque particulièrement endiablé.
Cet inconvénient eût été négligeable si la moitié des clients du bar n’avaient pas tous décidé le même jour de déplier le Républicain Populaire Libéré du Centre en s’hydratant le gosier. La localière finit tout de même par me reconnaître au milieu de tous ces passionnés de pétanque. Sans doute ne ressemblais-je point à un lecteur régulier de son journal. J’en conclus que mon idée de signe de reconnaissance avait finalement fonctionné mais à l’envers. Qu’importe ? La vie n’est pas un exercice de mathématiques dont le résultat pourtant juste est considéré comme faux s’il n’est pas établi au moyen du bon raisonnement.
Je vis donc se plier sur la chaise en face de moi une grande jeune femme au style neurasthénique. Elle s’excusa de garder au visage ses larges lunettes noires en raison d’une migraine qui avait dû lui déclencher pour quelques temps des humeurs aussi chagrines que celles d’une araignée veuve noire privée de son amant qui est aussi, ne l’oublions pas, son déjeuner. À certains moments, la vie nous dépossède de tout.
Bienvenue au club des migraineux ! lançai-je pour dédramatiser. Les lunettes descendirent d’un cran et deux yeux sombres noyés de douleur coulèrent en direction de mon insignifiante personne, fait remarquable quand on sait que le vrai migraineux en crise n’est plus en mesure de s’intéresser aux affaires du monde puisque pour lui, plus rien n’existe, pas même le monde, rien que la migraine.
Un pâle sourire s’évada sous les verres fumés : « alors vous aussi ? » Connexion en cours, à la bonne heure ! « Hélas... » répondis-je d’un air contrit. Il faut toujours se mettre à la portée de son interlocuteur. Jai lu cette recommandation dans un manuel intitulé Bien communiquer avec les autres écrit par un ancien directeur des ressources humaines devenu moine trappiste puis ermite des montagnes quelque part dans l’Himalaya où il a auto-édité tous ses autres livres à tirage limité sur feuilles de papier de riz humectées à la bave de lama et reliées avec des poils tressés du même animal. Pourquoi du papier humecté à la bave de lama ? Je préfère ne pas m’étendre sur un sujet aussi dégoûtant juste avant le repas.
« Que prenez-vous pour soulager votre migraine ? » s’enquit la journaliste. Nous nous livrâmes alors à un échange d’une rare intensité sur le thème des différents mérites et inconvénients de l’effervescence et des anti-inflammatoires combinés aux trucs et astuces permettant de tenir le fléau à distance au moins quelques minutes.
« Dans nos activités littéraires, c’est embêtant la migraine » assénai-je au bout d’une heure de considérations pharmaceutiques dans l'espoir de rappeler à la journaliste que nous n’étions pas là pour préparer l’assemblée générale des meurtris de la casquette mais pour présenter mon livre aux lecteurs avides.
La jeune femme opina du chef qu’elle avait semble-t-il encore plus douloureux qu’à son arrivée et me demanda pardon de devoir prendre congé car elle risquait de s’évanouir. Elle oublia sur la table l’exemplaire dédicacé de mon ouvrage qu’elle avait reçu en service de presse et m’abandonna au moment où je sentis naître au fond de mes yeux un mal pesant. Contagieuse, avec ça !
Quelques jours plus tard, je lui téléphonai pour solliciter un autre rendez-vous mais elle m’expliqua qu’elle avait finalement trouvé ma prose « un peu trop prise de tête » (selon son expression) pour les lecteurs d’une rubrique locale. Si j’avais su, j’aurais écrit un livre moins brillant, baissé un peu le niveau, mais que voulez-vous, je doute fort d’en être capable.
00:50 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christian cottet-emard, tu écris toujours, feuilleton, chroniques, humour, édition, auteur, écrivain, condition d'auteur, feuilleton humoristique, blog littéraire de christian cottet-emard, éditions orage lagune express, magazine, presse, oyonnax, peigne, ornement de coiffure, charles le chauve, médiathèque, haut bugey, rhône alpes, france, europe
06 février 2023
Carnet
Écrire revient pour moi à penser la nuit aux ciels de la journée et le jour aux ciels de la nuit. C’est une activité qui relève de la nostalgie de certains rêves éveillés bien que je ne sois pas moi-même quelqu’un de systématiquement nostalgique ou obsédé par les rêves, un état d’esprit qui s’apparente un peu à la saudade sans que je sois pour autant sûr que ce mot portugais impossible à traduire en français définisse au mieux cet étrange processus.
Vu de ma fenêtre, ces dernières semaines.
01:44 Publié dans Atelier, carnet | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : carnet, note, journal, blog littéraire de christian cottet-emard, écriture, littérature, nostalgie, rêve, christian cottet-emard, saudade, ciel, jour, nuit, chat, processus